Nous parlons aujourd’hui d’un sujet qui touche tout le monde; la souffrance de la vie en société.
Qu’est-ce que l'Homme face à la souffrance
Aussi surprenant que cela ne puisse paraître, nous faisons tous face à la souffrance, beaucoup plus tôt que ce que nous croyons. Dès nos premiers instants de vie, nous rencontrons la souffrance au moment de notre séparation à la mère par la rupture du cordon ombilical. On pourrait même élargir le sujet pour aborder tout le ressenti du fœtus dans le milieu ombilical quand la femme enceinte traverse des moments pénibles. Bref, vous l’aurez compris, qui que vous soyez, vous avez déjà certainement fait face à la souffrance. Avant d’aller plus loin, nous allons préciser de quelle souffrance nous parlons aujourd’hui. Nous ne parlons pas de la souffrance physiologique, même si la souffrance physiologique peut aussi entraîner une douleur psychologique. Ce qui retiendra notre attention, sera la souffrance psychologique. Celle qui ne se voit pas de façon tangible, celle qui est subie, celle qui nous détruit.
Face à la souffrance, il y a plusieurs questions qui se posent. Elle nous tombe dessous et on se demande comment la contrôler ? Comment s’en débarrasser ? Pourtant, la souffrance semble naturellement ancrée dans nos vies. Parfois, face à tellement de souffrance, on se demande si nous en sommes responsables ? Si nous méritons pleinement ce qu’il nous arrive. C’est à ce moment que plusieurs choix s’offrent à nous. Allons nous accepter de la vivre ? Allons nous la combattre ? Allons nous l’apprivoiser ? Et d’ailleurs, sommes nous tous égaux face à la souffrance ? Nous allons tout simplement aller ensemble dans un parcours de réflexion. Et pourquoi pas, de remise en question de notre paradigme vis-à-vis de la souffrance.
Dans le meilleur des mondes, nous sommes appelés à vivre harmonieusement tous ensemble dans la société, malgré nos différences, nos origines, nos croyances, nous avons le défi de réussir à vivre ensemble dans le meilleur des mondes. Malheureusement, si les choses se passaient ainsi nous serions dans un monde irréel.
Pourquoi nous n'arrivons pas à tous vivre en société dans la paix, dans l'amour, dans la joie ? Nous sommes tous très différents et nous réagissons tous différemment face aux besoins de conquête, à la soif du pouvoir, à la violence, et même face à l'amour nous ne sommes pas égaux. Avec tous ces paramètres aussi fastidieux les uns que les autres, nous voyons notre quête du bonheur devenir frêle. La souffrance que nous pouvons ressentir est-elle forcément causée par les autres ? Quelle est notre part de responsabilité dans ce que nous ressentons ? Si on part du principe que notre souffrance dépend des autres, est ce que cela ne veut pas dire que notre bonheur aussi en dépend ? Dans ces cas-là, nous rejoindrons la plus fameuse des citations de Jean Paul Sartre qui dit : "L’enfer, c’est les autres".
Alors, nous allons nous arrêter sur ce point, et faire un peu de philosophie et en passant, un peu de culture générale.
« L’enfer c’est les autres » ; cette citation est une des plus illustres de Jean-Paul Sartre. Elle achève la pièce de théâtre Huis Clos, écrite en 1943. Huis Clos relate l’arrivée de trois personnages en enfer. Deux femmes et un homme cherchant à comprendre ce qui a pu les y conduire et quel est leur châtiment. Ils comprennent rapidement qu’il n’y a pas de bourreau, car chacun des deux autres est le bourreau pour le troisième. Leur châtiment consiste donc à vivre pour l’éternité tous les trois, à coexister, à se détester et à se supporter.»
Le seul moyen de défense que l’homme a à sa disposition est de transformer autrui, à son tour, en objet. Il faut se délivrer d’autrui, lui échapper pour se réapproprier soi-même et le monde qu’autrui lui vole. La conscience invente ce subterfuge, c’est-à-dire, cet échappatoire pour continuer à exister en tant que sujet. Or autrui tente de résister à cette tentative de subordination. Ce qui ouvre une véritable lutte des consciences, dans laquelle je ne peux être reconnu par autrui que si je parviens à l’objectiver. Sartre a donc une vision conflictuelle des relations entre consciences.
Pour revenir à notre sujet, nos différences seraient à la fois notre richesse et à la fois notre point faible ? Notre richesse parce que, dans une société où tout monde a exactement les mêmes facultés et les mêmes tares, on ne serait plus capable d’évoluer en tant qu’individu. Mais si la présence de l’autre fait de moi une personne haineuse, alors l’autre devient mon point faible. Pour apprivoiser la souffrance causée par l’autre, il est indispensable de trouver un équilibre avec soi-même, puis avec l’autre. Mais, je vous l’accorde, c’est plus simple à mettre sur papier qu’à concrétiser. Quand on n'a pas apprivoisé soi-même la souffrance, on ne peut pas être capable de protéger l'autre d'une souffrance qu'on pourrait lui procurer ou encore au mieux de l'aider à vaincre la sienne. Une personne blessée, blesse inévitablement.
Beaucoup d'écrivains du domaine du développement disent que les événements de la vie sont neutres et que c'est nous qui leur donnons une orientation, en fonction de notre histoire. Partant de ce point de vue, j'aimerais poser la question suivante, est-ce qu'on est tous capables de juger les événements de façon neutre ? Est-ce que les événements qui nous font de la peine sont-ils réellement neutres ? Comment dire à une mère qui vient par exemple de perdre son nouveau-né, que c’est une situation neutre et qu’elle devrait le voir comme un évènement heureux. On voit tout de suite que cette approche semble brutale. Le plus important face à la souffrance, c’est d’abord l’acception. Tant que nous continuerons de lutter contre elle, nous serions malheureusement entrain de la faire grandir. Tant que nous essaierions de la contrôler, nous serions en train de nous faire souffrir. Le mieux, serait de l’accepter non pas de façon défaitiste, mais dans la résilience. C’est-à-dire comprendre que notre souffrance psychologique est un message que nous recevons, qui nous appelle à grandir. Au de-là de la vie en communauté, plusieurs évènements peuvent déclencher une souffrance psychologique. Ce déclenchement, vient toujours nous apprendre quelque chose sur notre être intérieur.
Souffrir n’est pas seulement quelque chose de négatif comme nous pouvons le penser dans notre société. La souffrance est un processus de guérison et de développement ; à condition que nous acceptions de la voir ainsi. Nous l’avons pourtant compris pour des choses naturelles, comme les blessures physiques. Au moment de l’impact la peau se déchire, on reçoit le choc et peu après elle se reconstitue, même quand nous n’y mettons aucun pansement. C’est le processus naturel de notre humanité. C’est relativement long, mais nous finissons par guérir quand nous restons à l’écoute de ce que nous ressentons, non pour nous juger, mais pour porter un regard d’amour et de compassion envers nous-même.
Comme je le disais plus haut, nous ne sommes pas égaux face à l’amour, le désir du pouvoir, la violence, la peur etc. De ce fait, on note que des fois quand une personne à l’intention claire de vous faire souffrir, vous pouvez retenir le fait que son geste en dit plus long sur elle-même. Seuls, les blessés, blessent.
Et de façon personnelle, je trouve que la souffrance vient nous dépouiller de notre ego, et même de notre fantasme de toute puissance. Elle vient nous rappeler notre humanité. Alors sous cet angle de vue, la souffrance est-elle toujours notre ennemie ?
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